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La débâcle de async en 3.7

Tue, 07 Aug 2018 13:14:40 +0000 - (source)

Quand les nouveaux mots clés async et await ont été introduits en Python 3.5, tout le monde a trouvé l’idée formidable. D’ailleurs, ça a été intégré à JavaScript.

Malheureusement, introduire des mots clés dans un langage est une opération très délicate.

Limites et contournements des mots clés

En Python les mots clés ont une caractéristique importante : on ne peut pas les utiliser pour quoi que ce soit d’autre.

Par exemple, class est un mot clé, donc je ne peux pas créer une variable, un attribut, ou une fonction appelé class. Ceci lève une erreur:

>>> class = 1
  File "", line 1
    class = 1
          ^
SyntaxError: invalid syntax
>>> class Foo: pass
... 
>>> Foo.class = 1
  File "", line 1
    Foo.class = 1
            ^
SyntaxError: invalid syntax
>>> 

Pour cette raison, quand on veut qu’une variable contienne une classe en Python, on la nomme cls:

>>> class Bar:
...     @classmethod
...     def wololo(cls):
...         print(cls, 'wololo')
... 
>>> 
>>> Bar.wololo()
 wololo
>>> 

C’est aussi pour cela que vous voyez parfois des variables nommées truc_. Souvent from_ par exemple, parce que from est un mot clé.

(pro tip: plutôt que from et to, utilisez src et dest)

Quand en Python 2 on a introduit True et False, un gros problème s’ensuivit: soit on en faisait des mots clés, et on pétait tout le code précédent qui utilisait ces mots, soit on en faisait des variables globales.

Le choix a été de garder la stabilité jusqu’à la prochaine version majeure, et c’est pour cela que:

Pour la 3.5, on avait donc ce même problème, avec une cerise sur le gâteau: la lib standard utilisait elle-même la fonction asyncio.async.

Le choix a donc de faire de async / await des variables globales, et de les transformer en mot clé en 3.7.

En 3.6, un warning a été ajouté pour rappeler aux gens de migrer leur code.

C’est un sacré taf, et ça comporte des risques comme nous allons le voir plus loin. C’est pour cette raison que l’ajout d’un mot clé dans Python est une des choses les plus difficiles à faire passer sur la mailling list python-idea.

Arrive la 3.7

La 3.7 est sortie avec tout un tas de goodies. Youpi. Mais aussi avec le passage de async/await de variables globales à mots clés, cassant la compatibilité ascendante. Quelque chose de rare en Python, et que personnellement j’aurais réservé pour Python 4, ne serait-ce que pour respecter semver.

Le résultat, tout un tas de systèmes ont pété: des linux en rolling release, des gens qui ont fait l’update de Python à la main, des gens qui maintiennent des libs compatibles 3.5 a 3.7…

D’autant que la 3.5 a asyncio.async, mais 3.7 considère ça une erreur.

Petit exemple avec l’impact sur debian.

Comment on aurait pu éviter ce merdier ?

D’abord, il aurait fallu ne pas introduire asyncio à l’arrache. Dans mon “au revoir” à Guido, je disais que je trouvais que les dernières fonctionnalités majeures de Python avaient été mises en oeuvre de manière précipitée.

Cela se vérifie encore et encore avec asyncio, dont il faudra que je fasse un article pour dire tout ce qui a mal tourné.

Casser la compatibilité ascendante dans une version mineure n’est pas acceptable, même si les dégâts sont limités et qu’on y survivra très bien.

Le fait qu’asyncio soit une API marquée comme “provisional” n’a jamais empêché quelqu’un d’appeler ses variables async. Après tout on utilise les threads depuis bien longtemps.

L’autre problème vient de l’amateurisme qui se glisse de plus en plus dans le dev.

C’est une bonne chose, parce que ça veut dire que la programmation est de plus en plus accessible et accueille de plus en plus de monde.

Mais cela veut dire aussi qu’une grosse part la population de programmeurs est aujourd’hui constituée de personnes qui n’ont ni les connaissances, compétences ou ressources pour faire les choses correctement.

On le voit particulièrement dans le monde JavaScript, ou c’est l’explosion (là encore, ça mérite un nouvel article). Mais l’exemple de la 3.7 nous montre que la communauté Python n’est pas immunisée, et je pense que le problème va s’amplifier.

Que veux-je dire par là ?

Et bien il y a 30 ans, cela ne serait pas venu à l’esprit de la plupart des devs de compiler quelques choses sans mettre les flags en mode parano pour voir ce qui allait péter. Après tout, quand on code en C, on sait que tout peut imploser à tout moment, alors la prudence est une question de culture.

Aujourd’hui par contre, la majorité des devs des langages haut niveau écrivent du code, font quelques tests à la main, et publient ça. D’autres les utilisent. Font des mises à jour en masse. Aucun ne prennent le temps ne serait-ce que d’activer les warnings les plus basiques.

Comme tout est facile à première vue, et c’est quelque chose dont on fait la promotion pédagogiquement parlant, car ça incite les gens à se lancer, on oublie la complexité inhérente à la programmation.

Mais il y a une différence colossale entre avoir un code qui marche une fois sur sa machine, et un code prêt pour la production.

Par exemple en Python, vous pouvez demander l’activation des warning pour chaque appel avec:

python -Wd

En 3.6, ça implique ceci:

>>> def async():
...     pass
... 
:1: DeprecationWarning: 'async' and 'await' will become reserved keywords in Python 3.7

L’info a toujours été là. Prête à être utilisée.

Mais alors pourquoi ne pas afficher tous les warnings, tout le temps ?

Et bien si je le fais:

python -Wa

Voilà ce que ça donne quand je lance juste le shell de python 3.6:

Voir le code sur 0bin.

Vous comprenez donc bien que ce n’est PAS activé par défaut. En fait, originalement le message était dans le corps de l’article, mais j’ai du le mettre sur 0bin parce que ça faisait planter WordPress. Si.

A chaque upgrade, il est important de vérifier les warnings pour préparer ses migrations futures.

Oui, c’est du boulot.

En fait…

La programmation, c’est BEAUCOUP de boulot

Même si on arrive maintenant à extraire une frame vidéo en gif en une ligne de commande.

Surtout maintenant qu’on y arrive en fait, car on multiplie les agencements hétérogènes de boites noires pour créer nos merveilleux programmes qui font le café.

Alors on prend des raccourcis.

Et puis aussi, parce qu’on ne sait pas. Qui parmi les lecteurs du blog, pourtant du coup appartenant à la toute petite bulle des gens très intéressés par la technique, connaissaient le rôle des warnings et comment les activer ?

Mais ce n’est pas le seul problème. Il y a clairement une question d’attentes et de moyen.

L’utilisateur (ou le client) final veut toujours plus, pour moins cher, et plus vite !

Et le programmeur veut se faire chier le moins possible.

Comme la complexité des empilements d’abstractions augmente, cela conduit à ignorer ce sur quoi on se base pour créer ce qui doit combler notre satisfaction immédiate.

J’ai parlé d’amateurs plus haut.

Mais je ne parle pas simplement de mes élèves. De mes lecteurs.

Je parle aussi de moi.

Prenez 0bin par exemple.

Il n’est plus à jour. Il n’a pas de tests unitaires. Il a des bugs ouverts depuis des années.

Ce n’est pas pro du tout.

Sauf que je ne suis pas payé pour m’en occuper, et c’est bien une partie du problème: nous sommes de nombreux bénévoles à faire tourner la machine a produire du logiciel aujourd’hui. Donc si je n’ai pas envie, fuck it !

Vous imaginez si l’industrie du bâtiment ou celle de l’automobile tournaient sur les mêmes principes ?

La moitié des dessins industriels faits par des bloggers, des étudiants, des retraités, des profs de lycées, des géographes, de biologistes et des postes administratifs ?

Des immeubles et des voitures dont des pièces sont fabriquées par des potes qui chattent sur IRC et s’en occupent quand ils ont le temps ? Gratuitement. Y compris le service après-vente.

Alors que les usagers veulent toujours plus: des normes sismiques et de la conduite autonome. Tout le monde le fait, alors la maison de campagne et la fiat punto, c’est mort, personne ne l’utilisera.

Difficile de maintenir la qualité à cette échelle.

Il y a tellement de demandes de dev, jamais assez d’offres, de ressources toujours limitées.

Et ça grossit. Ça grossit !

Aides techniques

Ceci dit, à l’échelle de la PSF, ça aurait dû être évité.

Avant d’aborder les aides techniques, il serait bon d’arrêter les conneries. Je me répète, mais c’était une vaste dauberie de faire passer async/await en mot clé avant Python 4.

J’ai parfaitement conscience du besoin de faire progresser un langage pour ne pas rester coincé dans le passé. Je suis pour async/await, très bonne idée, superbe ajout. Mettre un warning ? Parfait ! Mais on respecte semver s’il vous plait. Si vous avez envie de faciliter la transition, mettre un import __future__, et inciter les linters à faire leur taff.

En attendant, pour la suite, Python va faciliter le debuggage.

Par exemple, depuis la 3.7, les DeprecationWarning sont activés par défaut au moins dans le module __main__. Donc un développeur verra ses conneries bien plus rapidement.

E.G:

Imp est déprécié en 3.6, mais sans -Wd, on ne le voit pas:

$ python3.6
Python 3.6.5 (default, May  3 2018, 10:08:28) 
[GCC 5.4.0 20160609] on linux
Type "help", "copyright", "credits" or "license" for more information.
>>> import imp

En 3.7, plein de modules importent imp, mais les DeprecationWarning ne sont pas montrés, car ça arrive dans des codes importés. En revanche, si dans le module principal, vous importez imp:

$ python3.7 
Python 3.7.0+ (default, Jun 28 2018, 14:08:14) 
[GCC 5.4.0 20160609] on linux
Type "help", "copyright", "credits" or "license" for more information.
>>> import imp
__main__:1: DeprecationWarning: the imp module is deprecated in favour of importlib; see the module's documentation for alternative uses

Ça donne une info importante, sans foutre un mur de warnings à chaque lancement.

Une autre aide est l’apparition, toujours en 3.7, du mode développement de Python avec -X dev qui active tout un tas de comportements aidant au développement:

Évidemment, tout ça ne sert pas à grand-chose si on ne sait pas ce qu’il faut en faire. Et ça demande du temps et du travail, ce que l’amateurisme ne permet pas forcément.

Enfin je dis ça. La plupart des employeurs s’attendent à tout, tout de suite également. Donc au final, n’est-ce pas la culture générale de notre industrie qui est en train de virer dangereusement vers le vite fait mal fait ?

Même si il y a clairement une question de compétence (un prof de maths est généralement compétent en maths, alors que j’attends toujours de rencontrer un prof d’info qui est capable de mettre quelque chose en prod), la pression du marché a créé des attentes impossibles…

L’informatique n’existe comme secteur économique que depuis quelques décennies, contre des siècles pour la plupart des autres disciplines scientifiques. Pourtant on exige d’elle le même niveau de productivité. Il a bien fallut rogner quelque part, et c’est la fiabilité qu’on a choisit.

Quand il y 20 ans, on rigolait en comparant le debuggage de Windows a la réparation d’une voiture, et la punchline sur le redémarrage, ce n’était pas grave: un peu de virtuel dans un monde plein d’encyclopédies papier, de cabines ou bottins téléphoniques et autres cartes routières.

Aujourd’hui que notre monde entier dépend du fonctionnement de nos conneries codées à l’arrache, c’est plus emmerdant. Et ça explique aussi pourquoi le téléphone de ma grand mère fonctionne toujours mieux pour faire des appels que mon putain de smartphone a 600 euros. Mais je peux draguer une meuf par texto en faisant caca à l’aéroport. Tout a un prix.


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